L e s D o s s i e r s |
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Le Mendiant contre l'exploitation... |
– Ouais, on aide les pays qui achètent nos armes ou représentent des débouchés pour nos entreprises. Quant aux autres, ils peuvent bien crever et ils ne s’en privent pas ! Vous avez vu ce qui se passe en Afrique ? – Nous intervenons lors des catastrophes humanitaires tout de même. – Ouais, on y va, avec six mois de retard, un avion de journalistes et des caisses estampillées aux couleurs nationales pour bien signaler à tout le monde combien nous sommes généreux. Des milliers de gosses ont déjà crevé mais tant pis pour eux, ils n’avaient qu’à être patients et plus médiatiques ! – Vous avez d’autres solutions ? – Faudrait arrêter de confondre charité et humanitaire. Faut pas leur filer du poisson, mais les laisser pêcher en paix. Bien sûr, ça supposerait que nous arrêtions de piquer les poissons de leur lac, comme on l’a fait en Tanzanie , que nous acceptions de payer leurs matières premières à un prix potable et que nous respections nos foutues règles du libre-échange, même quand elles sont parfois à notre désavantage. Mais non, nous avons pris l’habitude de considérer le Tiers Monde comme un réservoir d’esclaves et de trucs bon marché où nous pouvons puiser à volonté pour mieux garantir nos profits et leur fourguer nos surplus alimentaires. – Comment se fait-il que vous soyez au courant de tout ça ? – Ben, grâce à la télé ! Je n’ai rien d’autre à foutre alors ça m’arrive de tomber sur des programmes intelligents. – Je pensais que le problème de l’Afrique venait surtout de la corruption de ses dirigeants… – Et de la fainéantise des Africains, c’est ça ? C’est bien pratique pour dormir sur ses deux oreilles ! L’Afrique est toujours aussi paumée parce que ça arrange bien notre business, un point c’est tout ! Vous parlez de la corruption, mais qui c’est qui a armé et mis en place bon nombre des dictateurs ? Nos idées démocratiques ont toujours beau dos lorsqu’il s’agit de garantir nos affaires. La vérité, c’est que la misère, ça rassure les puissants ! – Vous avez une vision bien machiavélique. Vous croyez vraiment que l’on s’amuse à jouer ainsi avec le feu ? – On joue avec et on s’y brûle. Ben Laden a bien été formé par la CIA, non ? – Certes, mais personne n’imaginait alors qu’il se retournerait contre l’Occident… – Dresser des pit-bulls n’est jamais sans danger pour le maître. Surtout si, ensuite, il s’en lasse et les abandonne…
Dialogue entre Jean-Jacques et le malade |
En 2001, les paysans vietnamiens ont vendu 4 000 dong le kilo de café qui leur a coûté 8 000 dong à produire. La chute des cours de café, qui arrange bien les comptes des industriels occidentaux, provient notamment de l’introduction massive de robusta vietnamien : +1400% de production en dix ans ! Or l’expansion de la production a été financée par un prêt de l’Agence Française du Développement… (source: Daniele Giovannucci, Who shall we blame ? The politics of Coffee, Tea & Coffee Trade Journal, Janvier 2002) |
« Coloniser : mettre en valeur et exploiter
les richesses d’un pays » (Définition du dictionnaire Le Robert,
2007) Cette définition a fait scandale au prétexte qu’elle
légitimerait la colonisation mais le véritable scandale est que cela
continue : sous couvert de la mondialisation, le système presse les
citrons partout où ils se trouvent ! Les richesses d’un pays ne sont
jamais aussi rentables que lorsque le pays est en proie au mal-être… |
Marcel Mazayer, professeur à l’institut national agronomique : « A partir des années 80, le FMI et la Banque Mondiale ont imposé au tiers monde l’ouverture des frontières, et donc l’importation de produits agricoles à bas prix. Pour aider les paysans ruinés, les pays occidentaux ont alors fourni des aides alimentaires. [Cette politique] a contribué à dévaloriser la production des pays pauvres. En décembre dernier, époque de la moisson, le blé de l’aide alimentaire américaine était vendu en Ethiopie 5 euros le quintal, alors qu’habituellement les paysans locaux vendent leur production à près de 17 euros […] Le nombre de pauvres exposés à la famine a ainsi augmenté, tout comme la dépendance du pays au soutien international ». 800 millions de personnes souffrent de la faim et les trois quarts sont des paysans qui ont été appauvris par la chute des prix agricoles. (Interview par Stéphane Benz, Capital, Février 2003) |
Naïveté ou cynisme ? On l’a vu avec l’exemple du café au Vietnam, on
le voit maintenant avec l’aide alimentaire : l’intervention des
occidentaux, lorsqu’elle ne tient pas compte du contexte économique
et géopolitique du pays d’accueil, se traduit souvent par
une pauvreté accrue chez les plus vulnérables…
ce qui arrange bien les affaires des occidentaux ! |
« Aucun fabricant ne respecte la réglementation chinoise ni même son propre code. Alors que les heures supplémentaires sont limitées en théorie à 36 mais, par dérogation officielle, à 66 en haute saison, l’usine de [censuré] en impose 214, sans même les payer au tarif légal. Pis, les employés n’ont droit à aucun jour de repos durant les mois de pointe. […] Impossible, pourtant, de démissionner puisque l’usine conserve alors la paie du dernier mois. » (Elisabeth Chesnais et Marie-France Corre, Les jouets de la honte, Que Choisir, Décembre 2004) |
Au prix ou nous payons certains produits, nous devons bien imaginer
que les fabricants ne sont pas soumis à nos minima sociaux. Les
sociétés occidentales (notamment les hypermarchés) sont les
premières à pressurer leurs fournisseurs étrangers
pour obtenir des prix de revient toujours plus bas, souvent au
mépris des normes locales, déjà assez limitées… Sur
210 millions d’enfants de 5 à 14 ans forcés de travailler
dans le monde, plus de 10 millions le sont ainsi dans des secteurs
d’exportation contrôlés par des multinationales occidentales. |
Selon l’Onusida, 96% des malades n’ont pas accès aux soins, notamment parce que les fabricants refusent de baisser leurs tarifs ou d’autoriser des génériques de leurs molécules. En 1997, 39 multinationales ont même attaqué en justice le gouvernement d’Afrique du Sud qui voulait fabriquer et importer des médicaments génériques pour soigner ses malades du sida. La plainte ne fut retirée qu’en avril 2001, devant le tollé suscité dans l’opinion publique. « L’industrie pharmaceutique sera tenue pour responsable du drame africain. En ayant perdu sur le terrain de la morale la plus élémentaire, elle pourrait bien y perdre au-delà de tout ce qu’elle peut imaginer sur les autres plans, y compris financier » dénonce Philippe Pignarre dans son livre Le grand secret de l’industrie pharmaceutique (La Découverte, 2003, p. 121) |
Voilà un joli paradoxe sur la santé à plusieurs
vitesses : dans les pays riches, ce sont les catégories
socioprofessionnelles les moins favorisées qui, non remboursement
oblige, ont le moins de chance de pouvoir se soigner au naturel.
Déjà fragilisés par leurs conditions de travail pénibles et une
moindre hygiène de vie, elles constituent un vivier particulièrement
juteux pour les vendeurs de médicaments. Cela est d’autant plus choquant que les labos ne se privent généralement pas pour piocher dans le patrimoine des pays lointains, déposant des brevets sur les molécules des plantes de la pharmacopée traditionnelle, sans évidemment reverser la moindre indemnité aux pays en question. Et ne pensez pas qu’il s’agisse là de remèdes exotiques peu usités : les antalgiques les plus utilisées (l’aspirine et la morphine) proviennent par exemple d’une pharmacopée déjà connue des Sumériens il y a 6000 ans ! (Ça m’intéresse, hors série N°14, octobre 2006, p. 52) Les remèdes de grand-mère (sans parler de ceux des arrières grand-mère) ont depuis longtemps fait leurs preuves… « Je ne vois pas pourquoi on exigerait de l’industrie
pharmaceutique des efforts spécifiques. Personne ne demande à
Renault de donner des voitures à ceux qui n’en ont pas »
déclarait ainsi en janvier 2000 dans Le Monde diplomatique, le
vice-président du Syndicat des industries pharmaceutiques. (Cité par
le magazine Capital, op. cit., p. 69) En effet sauf que, et jusqu’à
preuve du contraire, personne ne meurt parce qu’il n’a pas de
voiture, tandis que 8 200 personnes meurent chaque
jour du sida ! Allons, messieurs les financiers, il n’est pas
ici question de confort matériel mais de vie ou de mort ! |
Le marché mondial du lait pour bébés représentait 2 milliards de dollars en 1979, avec la part de marché du Tiers Monde qui passe de un tiers à la moitié pendant les années 1970. En 1998, il est estimé à 8 milliards de dollars. Nestlé, le numéro un mondial, contrôle environ 40% de ce marché. (Dominique Prédali, Les dessous de l’agro-alimentaire, Editions du Dauphin, 2001, p. 146) |
Si le marché des médicaments n’est pas toujours rentable dans les
pays pauvres, celui du lait en poudre se porte bien, merci pour lui.
A première vue, c’est une bonne nouvelle : cela prouve que les pays
pauvres achètent de quoi se nourrir. A deuxième vue,
il ne faudrait jamais se fier aux apparences… |
Les Etats-Unis subventionnent massivement leur production de coton, empêchant les pays africains d’exporter leur production à un tarif convenable. « Nos pays ne demandent pas l'aumône, pas plus qu'un traitement de faveur ni une aide », a déclaré le Président du Burkina Faso, Blaise Compaoré en 2003, au comité des négociations commerciales de l'Organisation Mondiale du Commerce. « Nous exigeons seulement l'application des règles régissant l'économie de marché, conformément aux principes directeurs de l'OMC.» |
Evidemment, pas question pour le Nord d’accepter la réciprocité :
que l’argent des dictatures ou du « business » vienne chez
nous, soit : il y est même le bienvenue ! ; qu’une main d’œuvre bon
marché alimente le travail au noir et réduise ainsi le coût du
travail pour les entreprises, passe encore, mais que les pauvres se
mettent à concurrencer nos propres produits ? Alors ça, non : il y a
quand même des limites à la générosité ! Toujours à propos du 11 septembre, je vous invite, si ce n'est
pas déjà fait, à visionner le film (1h22mn!) sur
l'Autre thèse: le 9/11 serait de la pure manipulation!
Les tours jumelles se sont bien écroulées (un fait difficile à
contredire) mais pas pour les raisons
officiellement données. Il est évidemment difficile d'être convaincu
à 100% mais les questions posées et les résultats de l'enquête
parallèle sont néanmoins troublants, au point que seuls 14% des
américains croiraient désormais à la version gouvernementale...
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ReOpen 911 |
« Le Papalagui appelle ça : « Être au courant de tout ». Il veut être informé sur tout ce qui se passe dans son pays d’un coucher de soleil à l’autre. Il est outré, quand quelque chose lui échappe. Il absorbe tout avidement, bien que toutes les horreurs aussi soient divulguées et tout ce qu’un homme de bon sens préfère oublier très rapidement. Et justement, ce mauvais qui est porteur de douleurs est encore plus minutieusement communiqué que tout le bon, oui, jusqu’au dernier détail, comme si le bon n’était pas beaucoup plus important et gai à partager que le mauvais ! [...] les mille papiers ont fait du Papalagui ce qu’il est : un être faible et dans l’erreur, qui aime l’illusion et ne sait plus reconnaître le réel, qui confond la lune avec son reflet et une natte couverte d’inscriptions avec la vie.» (Touiavii, chef de tribu Samoa, Le Papalagui, les étonnants propos de Touiavii, chef de tribu, sur les hommes blancs, Pocket, p. 109-111) |
Les pays démocratiques ont, tout comme les dictatures, recours à la
manipulation des images pour faire passer des
messages simplistes et diriger leurs moutons. La télévision est une formidable machine à
désinformation (à information aussi mais encore faut-il pouvoir
faire la différence) devant laquelle nous abandonnons toute réflexion au
profit du choc des images. C’est parfois beau et nous sommes émus.
C’est souvent violent et nous sommes traumatisés ou révoltés. Il y a
parfois des reportages intéressants et informatifs dans lesquels
l’image argumente la réflexion mais la majorité des images se
suffisent à elles-mêmes et le journal télévisé devient un diaporama
de clichés vides de sens, idéal pour que notre « temps de cerveau
humain » (expression de Patrick Le Lay, PDG de TF1) soit
réceptif aux annonces publicitaires. |
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